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MILLE ET UN JOURS

— « Comment pouvez-vous dire cela ?… Un tel héros qui disparaît !… N’est-ce pas déplorable ? »…

— « Nicht fur uns »… fut encore ma réponse.

Je ne savais trop quelle impression produirait chez mon interlocuteur cette franchise avec laquelle j’exprimais mon opinion.

— « Pourquoi parlez-vous ainsi ? »  …

— « Mais, je n’ai fait que marcher sur vos traces. Lorsque j’exprimai, un jour, mes regrets au sujet de la mort peu glorieuse de Lord Kitchener, qui eût certes mérité beaucoup mieux, vous m’avez répondu en vous servant de ces mêmes mots : « Nicht fur uns !  » Aujourd’hui Richthofen est tombé, mais il est tombé dans l’arène où son génie lui avait fait un nom immortel. Il est sans doute regrettable pour l’Allemagne, je le conçois, qu’elle soit désormais privée de ses précieux services, mais vous ne pouvez pas vous attendre que les sujets des pays en guerre avec elle expriment leurs regrets au sujet de sa disparition. »

J’ignore dans quelle mesure mon officier apprécia la correction de mon attitude et la justesse de mes remarques, mais à l’instant même il me quitta… à la prussienne.

J’eus, un jour, une discussion assez vive avec le capitaine Wolff, de la Kommandantur de Berlin. Cet officier était conseiller judiciaire de guerre, et occupait, à la Kommandantur, une position très haute