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EN PRISON À BERLIN

n’est pas, selon l’expression si saine et si forte du langage spontané, remis à sa place ; c’est rétablir l’ordre, rasseoir l’équilibre, restaurer la paix sur la base de la justice.

La vengeance publique ainsi comprise peut irriter la sensiblerie d’une âme faible ; elle n’est pas moins, dit saint Thomas, l’expression, la loi de la charité la plus pure et du zèle qui en est la flamme. Elle ne se fait pas de la souffrance une cible, mais une arme, vengeresse du droit méconnu.

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Le chef de l’une de nos plus nobles familles m’écrivait : « Notre fils, du 7e de ligne, est tombé ; ma femme et moi en avons le cœur brisé ; cependant, s’il le fallait, nous le redonnerions encore. »

Un vicaire de la capitale vient d’être condamné à douze ans de travaux forcés. On me permet d’aller dans sa cellule l’embrasser et le bénir : « J’ai, dit-il, trois frères au front ; je crois être ici pour avoir aidé le plus jeune — il a dix-sept ans — à rejoindre ses aînés ; une de mes sœurs est dans une cellule voisine, mais, j’en remercie le bon Dieu, ma mère ne reste pas seule ; elle nous l’a fait dire ; d’ailleurs, elle ne pleure pas. »

N’est-ce pas que nos mères font songer à la mère des Macchabées ?

Que de leçons de grandeur morale ! Ici même et sur le chemin de l’exil, et dans les prisons et dans les camps de concentration, en Hollande et en Allemagne !

Pensons-nous assez à ce que doivent souffrir ces braves qui, depuis le début de la guerre, au lendemain de la défense de Liège et de Namur ou de la retraite