Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 1.pdf/41

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Il combat, il subjugue, il renverse, il élève ;
Tout ce qu’il veut de grand, sa fortune l’achève.
Nous voyons, lorsqu’à peine on connaît ses desseins,
Les peuples étonnés tomber entre ses mains.
Alors son bras puissant apaisant la victoire
Soutient le monde entier qu’ébranlait tant de gloire.
Le Très-Haut l’ordonnait. Où sont les vains mortels
Qui s’opposaient au cours des arrêts éternels ?
Faibles enfants qu’un char écrasa sur la pierre,
Voilà leurs corps sanglants restés dans la poussière.
Au milieu des tombeaux, qu’environnait la nuit,
Ainsi je méditais par leur silence instruit.
Les fils viennent ici se réunir aux pères,
Qu’ils n’y retrouvent plus, qu’ils y portaient naguères,
Disais-je, quand l’éclat des premiers feux du jour
Vint du chant des oiseaux ranimer ce séjour.
Le soleil voit, du haut des voûtes éternelles,
Passer dans les palais des familles nouvelles ;
Familles et palais il verra tout périr !
Il a vu mourir tout, tout renaître et mourir ;
Vu des hommes, produits de la cendre des hommes ;
Et, lugubre flambeau du sépulcre où nous sommes,
Lui-même, à ce long deuil, fatigué d’avoir lui,
S’éteindra devant Dieu, comme nous devant lui.


Ce goût de Béranger pour le simple et le réel se développa dans un poème idyllique en quatre chants, intitulé le Pèlerinage, où il s’attacha à reproduire les mœurs pastorales, modernes et chrétiennes ! l’époque choisie était le seizième siècle, et toute locution mythologique en était soigneusement bannie. Sans affirmer que l’auteur ait réussi à faire un tout suffisamment intéressant et neuf, on ne peut s’empêcher de rendre justice à l’intention générale et parfois au bonheur avec lequel les détails sont enchâssés.