Page:Béranger - Ma biographie.djvu/12

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reux de se lancer dans les affaires, il pensa à se marier à près de trente ans. Une jeune fille de dix-neuf ans, vive, mignonne, bien tournée, passait tous les matins devant la porte de l’épicier pour se rendre au magasin de modes où elle travaillait. Mon père s’en éprit, la demanda et l’obtint du tailleur Champy, qui avait six autres enfants.

Mon grand-père ne donna d’autre dot à son gendre que d’utiles relations, dont celui-ci eût pu tirer parti.

Loin de là ; après six mois de mariage et de prodigalités, les deux époux se séparaient, mon père pour aller en Belgique, ma mère pour se retirer chez ses parents ; elle travailla de son état de modiste, et ne regretta guère l’absence d’un mari pour qui elle n’eut jamais beaucoup d’affection, quoiqu’il fût bon, aimable, gai et d’un extérieur agréable. Ma naissance faillit coûter la vie à ma mère : il fallut recourir au forceps pour me faire entrer dans ce monde, d’où je voudrais bien sortir avec moins de façon. Plus tard, une grande défiance de moi-même m’ayant fait voir des difficultés aux moindres choses, il m’est arrivé souvent de dire que rien ne m’avait été facile, pas même de naître.

Envoyé en nourrice aux environs d’Auxerre, je restai là plus de trois ans sans que personne se soit jamais beaucoup inquiété de savoir si j’étais bien ou