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Page:Béranger - Ma biographie.djvu/209

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me furent faites. Cette place valait six mille francs ; c’était refuser le superflu quand le nécessaire me manquait. Je n’avais plus alors pour suffire à mes charges que mon modique emploi, parce que j’avais fait à M. de Bleschamps, père de Madame Lucien Bonaparte, tombé dans le besoin par suite de l’exil de son gendre, l’abandon du traitement de l’Institut[1]. Par des arrangements auxquels avaient présidé Arnault et Regnault de Saint-Jean-d’Angély, seul j’avais droit de le toucher, et, en effet, je l’ai touché jusqu’en 1814, époque où M. Lucien fut éliminé de l’Académie par ordonnance royale. Mais depuis longtemps déjà il m’avait paru convenable d’en remettre, mois par mois, le montant au père de la princesse, et il m’en faisait tenir quittance.

Ma liaison avec Manuel[2] date de la fin de 1815. Il était d’un abord réservé ; j’avais encore beaucoup

  1. Voir dans la Correspondance une note détaillée sur ce fait. On y voit que, dès le 20 avril 1812 et jusqu’au 7 avril 1815, Déranger remettait à M. B. Cabarrus, pour M. de Bleschamps, la totalité du traitement. (Correspondance, t. I, p. 202.)
  2. Manuel (Jacques-Antoine), né à Barcelonnette, le 19 décembre 1775, s’était engagé comme volontaire, en 1793, et était devenu capitaine d’infanterie. Blessé et malade, il retourna dans son pays natal, après la paix de Campo-Formio, et s’appliqua à l’étude des lois. Son talent pour la plaidoirie fut bientôt remarqué à Aix. Ses compatriotes l’élurent représentant pendant les Cent-Jours et alors commença sa courte et brillante carrière politique. Il est mort le 20 août 1827, à Maisons, chez M. Laffitte, dans les bras de son frère et de Béranger.