Page:Béranger - Ma biographie.djvu/265

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tories anglais, il était certain qu’une révolution en France ne serait pas vue de mauvais œil si elle s’arrêtait à un changement de personne. Il y aurait peut-être eu là de quoi faire hésiter ceux qui poussaient à cette révolution, si Charles X ne l’eût rendue inévitable.

Ceci m’amène à parler de M. de Talleyrand[1] et du peu d’occasions que j’eus de mesurer cet homme à sa renommée. Il avait exprimé plusieurs fois le désir de me rencontrer. « Que ne l’invitez-vous à dîner ? lui disait un de mes amis, qui savait qu’en penser. — Je suis trop grand seigneur pour me faire refuser, » répondit-il en souriant. Il demanda à Laffitte[2] de le faire dîner avec moi : c’était au commencement de 1827. Je pus enfin voir à mon aise ce personnage si curieux à observer. Aussi, d’abord, je fus tout yeux et tout oreilles. Il savait que, plusieurs années avant, sollicité indirectement par quelqu’un du pouvoir de faire une chanson contre lui, j’avais répondu : « J’attends qu’il soit ministre. » Il ne m’en

  1. Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, né à Paris en 1754, mort le 17 mai 1838. (Voir les Lettres d’un voyageur de George Sand celle qui a pour titre le Prince. C’est le tableau émouvant de la fin d’une existence qui a si justement attiré l’attention et encouru les rigueurs de l’histoire.) C’est en 1868 que pourront paraître les Mémoires de Talleyrand, déposés pour trente ans en Angleterre.
  2. Jacques Laffitte, né à Bayonne le 24 octobre 1767, mort à Paris le 26 mai 1844.