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au moins, toutes deux plus sombres encore et plus lugubres que les aventures d’Ulysse, s’étaient, durant des siècles et des siècles, transmises de peuples à peuples et de langues en langues, à travers tous les changements des empires et des races qui occupèrent les plaines et les plateaux de l’Asie antérieure.

L’épopée de Gilgamesh nous est parvenue dans la traduction qu’en firent les Assyriens, sur les douze tablettes de la bibliothèque d’Assourbanipal (669-626). Mais des tablettes sumériennes nous en ont sauvé des fragments qui sont antérieurs de quelque mille années, et les fouilles de Boghaz-Keui nous ont apporté les fragments d’une recension hittite qu’avaient fait faire pour leur bibliothèque royale les empereurs de ce peuple anatolien : vers les xiie-xie siècles avant notre ère, tout le « Proche Orient », de la mer Noire aux frontières de l’Égypte, du Bosphore au golfe Persique, connaissait, lisait les aventures du héros d’Érech, auquel la faveur, puis la colère des dieux avaient imposé de terribles voyages dans le monde des vivants et des morts.

Nous ne les connaissons aujourd’hui que très imparfaitement encore. Le joug ottoman s’est maintenu sur le Pays des Fleuves jusqu’en 1918, entravant ou ralentissant les assyriologues dans leurs reconquêtes de l’histoire et