Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 1.djvu/73

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Dès l’antiquité, Diodore de Sicile avait enregistré certaines prétentions des Crétois, qui revendiquaient pour leurs Minos l’invention de l’alphabet ou, du moins, de l’écriture. Qui pouvait donc affirmer que ces signes minoens n’avaient pas été la source de nos lettres « européennes », et ces écrits minoens, le début de la littérature grecque ?… Il était de mode alors (1890-1910) de nier l’importance et même le rôle que les Anciens attribuaient unanimement aux Phéniciens : une sorte d’antisémitisme érudit, dont M. Salomon Reinach était en France le coryphée, expulsait de la Grèce primitive ces courtiers et ces éducateurs ; on en voulait jusqu’à leur existence ; d’un trait de plume, M. Isidore Lévy les supprimait de la Méditerranée ; un véritable pogrom se déchaînait non seulement contre eux, mais contre leurs défenseurs anciens et modernes et contre les monuments qui pouvaient gêner la fureur de nos « phénicophobes ».

En 1910, on mettait en vente à Paris un buste d’Osorkhon Ier (924-895), fils et successeur de Sheshonq Ier (945-924), le fondateur de la XXIIe dynastie égyptienne : ce fragment de statue brisée portait un cartouche égyptien en hiéroglyphes et une inscription phénicienne en