Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/217

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Aussi bien en Allemagne, en Angleterre et ailleurs qu’en France, on tolère que les plus nobles œuvres dans tous les genres soient arrangées, c’est-à-dire gâtées, c’est-à-dire insultées de mille manières, par des gens de rien : Mozart a été assassiné par Lachnith, et Weber par Castilblaze ; Gluck, Grétry, Mozart, Rossini, Beethoven, Vogel ont été mutilés par ce même Castilblaze ; Beethoven a vu ses mélodies corrigées par Fétis, par Kreutzer et par Habeneck ; Molière et Corneille furent taillés par des inconnus, familiers du Théâtre-Français ; Shakespeare enfin est encore représenté, en Angleterre même avec les arrangements de Cibber et de quelques autres… N’entend-on pas à Londres des parties de grosse caisse, de trombone et d’ophicléide ajoutées par M. Costa aux partitions de Don Giovanni, de Figaro et du Barbier de Séville ?

Nos manuscrits sur papyrus sont tous postérieurs au ive siècle avant notre ère ; ils ne nous ont rien appris de certain sur les plus vieux Homères de la petite Grèce ionienne ou de la Grande Grèce périphérique. Mais ils nous fournissent un document de comparaison, qui, pour être emprunté à une époque toute différente, — à la fin du second ou au début du troisième siècle après Jésus-Christ, — n’en est pas moins d’une importance décisive : ce qui fut possible cinq ou six cents ans après Périclès et Socrate, en pleine civilisation lettrée et bibliophile, dans la Rome des atticisants et des bibliothèques, peut nous