Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/241

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répartition se fût d’ailleurs imposée à l’auteur qui composait ou disposait son œuvre pour des lectures successives chez Mme Récamier.

En cette « épopée » des Mémoires (pour reprendre un mot d’A. Vinet), sous la division en feuilletons que la Presse avait introduite, M. E. Biré a facilement retrouvé et rétabli la répartition organique :

Chateaubriand est pour nous un Ancien, un des classiques de notre littérature : le moment est venu de donner une édition des Mémoires qui replace le chef-d’œuvre dans les conditions mêmes où il fut composé et nous le restitue dans son intégrité première… Lors des lectures de l’Abbaye-au-Bois en 1834, les auditeurs avaient été frappés de la beauté des prologues qui ouvraient les « livres » des Mémoires.

Les « lettres » des Alexandrins[1] doivent aller rejoindre les « feuilletons » d’Émile de Girardin, si l’on veut que le lecteur français puisse partager l’admiration, l’enthousiasme, que, durant des siècles, excita dans tout le monde grec la récitation des Poésies.

  1. Pour un assez grand nombre d’auteurs antiques, il en fut de même : « Au début du second siècle avant notre ère, les dialogues très étendus de Platon, comme la République et les Lois, furent partagés en livres : Platon n’a certainement pas été l’auteur de ce découpage. On sait maintenant que presque toutes ces divisions ont été introduites dans les œuvres classiques par les Alexandrins. Elles sont nées sans doute de nécessités pratiques. On avait acheté de toutes parts les œuvres des grands écrivains ; quand le contenu en était quelque peu étendu, il se trouvait arbitrairement réparti entre plusieurs rouleaux ; or il était gênant d’avoir, dans une bibliothèque, un même ouvrage partagé différemment suivant les exemplaires. On détermina donc une fois pour toutes des divisions fixes. Par la suite, on améliora quelquefois ces premières divisions, comme le prouve l’emploi de plusieurs modes de partage, — pour la République de Platon en 6 et 10 livres, pour Thucydide en 8, 9 et 13 livres » (H. Alline, Histoire du Texte de Platon, p. 100). On sait le traitement que les mêmes Alexandrins firent subir au texte d’Hérodote pour le diviser en « neuf Muses », en supprimant les logoï, « discours », que l’auteur avait dispersés pour la lecture publique et dont le texte même nous a gardé les traces évidentes. Par contre, en son édition de Platon, Aristophane de Byzance groupa les dialogues en trilogie, nous dit Diogène Laerte, qui énumère cinq trilogies et ajoute : « Les autres œuvres demeuraient séparées, non rangées ».