Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/52

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si l’on peut dire, faire la province et la campagne. Un autre jour, les révolutions politiques lui donnèrent pour public en ses villes d’origine les citoyens de démocraties moins affinées et, pour voisines, les habitudes populacières de l’agora et du théâtre. Enfin le récitant de métier, le rhapsode, entreprit des tournées outre-mer, chez les lointains colons du Nouveau-Monde panhellénique, chez les cow-boys (c’est l’équivalent des boukoloï de la littérature grecque) du Far-West sicilien ou italiote et dans l’Extrême Orient de Chypre et de Naucratis… Tout changea pour les Poésies : les rhapsodes errants les mirent au service et au plaisir d’oreilles moins éprises de délicatesse que de grosses sensations et de gros rire.

Il est regrettable pour nos études homériques que nous n’ayons pas le journal minutieusement fidèle de quelqu’un de ces tragédiens ou tragédiennes d’Europe qui, les premiers, voici un demi-siècle à peine, colportaient nos tragédies et comédies européennes dans les Grandes Angleterres ou les Grandes Espagnes d’Amérique et d’Australie. La légende s’est emparée des changements, additions et coupures que devaient alors subir nos poèmes de vieille civilisation, pour s’accommoder aux hasards des traversées, des brusques arrivées et des départs, aux connaissances, aux préjugés et au