Page:Bérard - Un mensonge de la science allemande, 1917.djvu/120

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Français, desertas quorundam Gallorum ineptias repetiisse[1]. »

Wolf, à son ordinaire, ne nommait pas Cesarotti, lequel était encore vivant et aurait pu répondre en fournissant des preuves, dont Wolf n’avait que faire.

... En pleine connaissance de cause, si l’on peut reprocher quelque chose à Cesarotti c’est d’avoir été trop indulgent. Car Wolf avait sûrement imité, copié d’Aubignac ; mais ce prudent sujet du roi de Prusse n’avait pas osé faire siennes les « hérésies » du courageux Français.

D’Aubignac savait très bien ce que l’on pouvait risquer à nier l’existence d’Homère, du dieu de la poésie : cet « athéisme » homérique (pour reprendre un mot de Villoison, repris déjà par M. Salomon Reinach) pouvait être déféré comme l’autre au bras séculier, lequel aurait sévi d’autant plus durement contre l’auteur, que sa « profession » l’obligeait à plus de respect envers les vérités traditionnelles ; un abbé de 1664 n’avait pas encore ce droit au libertinage et à l’esprit fort qui fut si libéralement concédé à ses successeurs du xviiie siècle. Il en pouvait coûter à d’Aubignac tous ses revenus, le jour où cette « opinion, singulière à la vérité, » l’obligerait « à se défendre des orages de la Cour et des foudres du Vatican » (p. 6). Il est possible que cette considération, avec d’autres, ait décidé Charpentier à mettre en sac les Conjectures.

  1. Alexis Pierron donne en appendice à son Iliade (tome II, p. 567) un résumé de cette préface ; ayant cité la phrase ci-dessus, il ajoute en note : « Les Français auxquels Wolf fait allusion ici sont l’abbé d’Aubignac, Perrault, La Motte, etc., hommes d’esprit, mais absolument dénués de science et de raison. Wolf, qui a traité son sujet en savant consommé, ne veut pas être confondu avec des gens qui parlent de ce qu’ils n’ont pas même pris la peine d’étudier ». Après cela, on a le droit de se demander si Alexis Pierron a « pris la peine d’étudier » ou de feuilleter seulement d’Aubignac.