Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/315

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graves, comme s’ils n’osaient pas troubler le repos de leur vallée, les saluaient tranquillement sur leur passage. Dans les cabanes on se remuait, on se pressait autour d’Oberlin, qui les admonestait, leur donnait d’utiles avis, les consolait ; partout des regards pleins de confiance, des prières. Les gens racontaient leurs rêves, leurs pressentiments. Puis rapidement on passe à la pratique : on plante des routes, on creuse des canaux, on visite l’école. Oberlin était infatigable. Lenz l’accompagnait continuellement, se livrant tantôt à la causerie, tantôt au travail, ou se plongeant dans la nature. Tout exerçait sur lui une influence bienfaisante et apaisante. Il avait besoin de regarder souvent Oberlin dans les yeux, et la sérénité puissante qui nous vient au sein de la nature endormie, dans les forêts profondes et durant les douces nuits d’été éclairées par lune, lui apparaissait plus sensible encore dans cet œil tranquille, sur ce vénérable et sérieux visage. Il était timide, mais il faisait des remarques, il parlait. Oberlin aimait sa conversation, et la gracieuse physionomie enfantine de Lenz le remplissait de joie. Mais aussi longtemps seulement que la vallée restait claire, son état était supportable ; aux approches du soir une inquiétude étrange s’emparait de lui, il aurait voulu suivre le soleil à la course ; au fur et à mesure que les objets devenaient plus sombres, tout prenait à ses yeux un aspect fantastique et désagréable ; il lui venait une angoisse comme aux