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critique sociale

restée sur les bras. Elle n’est pas à la mode, et je viens vous prier de l’y mettre. Paraissez avec une robe de ce genre et je suis sauvé.

— Vous me flattez beaucoup. C’est une illusion, je le crains.

— Non, madame, non, je suis sûr de ce que j’avance. »

Et, tout en parlant, il pose son paquet sur une table, l’ouvre et étale sa pièce.

« Ah ! monsieur, » s’écrie mademoiselle Mars épouvantée, « une robe Jaune ! vous n’y pensez pas. C’est impossible, »

Dans ce temps-là, — sous la Restauration, — on était encore un peu primitif. Madame la mode n’avait pas jeté son bonnet par-dessus les moulins. Elle avait ses caprices, mais tempérés de pruderie, et tenait rigueur à ses amants sur l’article fidélité. Le jaune, le plus beau, sans contredit, des rayons de l’arc-en-ciel, qui n’aveugle pas comme le rouge, qui réunit à La fois la douceur et l’éclat, le jaune, véritable type de la splendeur, n’était pas la couleur favorite de l’occident. En Chine,il règne. En Europe, il est ridicule. Il l’était plus encore, il y a cinquante ans. Le préjugé a un peu perdu.

Qu’on juge de l’effroi de mademoiselle Mars, à la vue de cette nuance proscrite et moquée.

« Une robe jaune, grand Dieu ! Mais je serai burlesque. La salle éclatera. On va crier : Au canari !