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critique sociale

deux pas qu’une salve de bravos fait trembler la salle. Un coup d’œil aux loges et aux galeries termine ses angoisses. Victoire complète. La plus grande agitation règne dans la gent féminine. Toutes les lorgnettes se braquent d’enthousiasme sur la robe jaune, C’est une soirée triomphale,

La pièce finie, le Lyonnais, qui était venu attendre son arrêt dans la salle, se précipite dans la loge et aux pieds de l’actrice. Elle à la gloire, il à le profit. Chacun est ravi de son lot et on s’accable de congratulations. L’homme cependant tenait la corde.

« Ah ! je le savais bien que vous seriez irrésistible et que vous feriez ma fortune. »

Le lendemain, tout Paris de courir aux magasins de soieries, en demandant l’étoffe jaune. Stupeur des commis. Qu’est-ce que ces Chinoises égarées sous les latitudes parisiennes ? On se rabat alors aux renseignements chez mademoiselle Mars qui donne l’adresse du vendeur. Sa fortune était faite vraiment. Toutes ses étoffes, jusqu’au dernier centimètre, furent enlevées à des prix fous.

Sur ce, la fièvre jaune éclate dans la fabrique lyonnaise, et tous les métiers, alléchés par l’aventure, se mettent à battre sans relâche pour la nuance victorieuse. Trop tard, moutons de Panurge, trop tard ! La vogue jaune n’était qu’un