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préface.

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Uallégorie dans les beaux-arts est très-fréquente. Elle consiste à employer un signe natnrel ou une image a la place de l’objet ou de l’idée qu*on veut exprimer. Les Anciens, dont presque toutes les divinités sont allégoriques, ont excellé dans ce genre, et nous nous servons encore des attributs qu’ils leur ont donnés : le coq est toujours la figure allégorique de la vigilance ; le paon rappelle l’orgueil, le cheval la guerre, l’olivier’la paix, etc. En montrant Vénus reposant sur une tortue, on voulait enseigner à la femme qu’elle doit craindre de se montrer, et se vouer par goût à la retraite. Est-il une allégorie plus parfaite que celle qui place un papillon sur une tombe ? C’est par allégorie que la Sagesse était représentée sous les traits de Minerve armée, s’occupant de sciences, d’arts, de travaux a l’aiguille, s’isolant par le secours de l’égide, et choisissant pour compagne la chouette, témoignage de son goût pour l’obscurité. Les transports, la légèreté, l’imprévoyance de l’Amour étaient ingénieusement exprimés par un flambeau, des ailes et un bandeau. L’Amour assis sur un lion indique qu’il adoucit les cœurs les plus farouches. Une pierre gravée le représente suppliant Apollon de lui prêter sa lyre ; c’est le symbole de la puissance du talent pour mire naître l’amour. Les colombes de Vénus faisant leur nid dans le casque de Mars sont Pemblème de la paix.

Les artistes modernes ont également fait usage de l’allégorie. Dans les anciennes peintures chrétiennes, l’image d’orphée, entouré d’animaux que charment ses accords, figure la mission de Jésus-Christ ; ou bien, Jésus est représenté sous les traits de Daniel parmi les lions, de Jonas avalé par la baleine et rendu à. la lumière trois jours après, d’un agneau blanc qui meurt au pied d’une croix, et d’un phénix qui’s’élève dans les airs ou se pose à la cime d’un palmier. Rubens a peint de cette manière, pour la galerie du Luxembourg, toute l’histoire de Marie de Médicis. Le Poussin a caché la tête du Nil dans des roseaux, pour indiquer que sa source est inconnue. Girodet a raconté l’histoire de Diane, en faisant descendre un rayon de la lune sur les lèvres d’Endymion. On admire encore les allégories par les uelles Prud’hon a représenté le Crime poursuivi par la gustice et le Remords, et Gérard l’Amour anímant Psyché. Mais l’allégorie peut n’être pas intelligible ou n’ofl*rir qu’un jeu de mots : telle est la peinture où Augustin Carrache, voulant exprimer l’idée que l’Amour est vainqueur de tout (en grec pan), a représenté le dieu l’an vaincu par l’Amour.

Les graveurs de l’antiquité portaient le goût de l’allégorie jusque dans le choix des matières qu’ils employaient : ils gravaient les divinités bachiques sur des améthystes, les divinités infernales sur des pierres noires, les divinités des eaux sur des pierres verdâtres, B.

ALLEGRO, et par abréviation Allfl, terme italien de musique qui signifie gai, joyeux. Il indique, non le caractère qu’on doit donner a l’exécution d’un morceau, mais le degré de vitesse du mouvement de ce morceau. Il s’applique tout aussi bien aux situations pat lié tiques, à. l’expression de la fureur et du désespoir, qu’aux sujets joyeux. Aussi ajoute-t-on souvent au mot Allegro un autre mot qui décide mieux le caractère de la composition, comme All° giutsto, commodo, modérato, maestoso, agitato, spiritoso, vivace, etc. Le mouvement Allegro a au-dessus de lui le presto, qui indique une plus grande vitesse, et, au-dessous, Pallegretto, annonçant moins de rapidité. B.

ALLELUIA, c.-à-d. en hébreu Louez le Seigneur, cri de joie et d’acclamation que S* Jérome a emprunté au service de la synagogue pour l’introduire dans celui de l’Église, où il est une formule d’introduction ou de terminaison d’un certain nombre de chants, tels que versets, antiennes, répons. A l’époque où l’on ne se servait pas de cloches, on appelait les religieux des couvents a la prière par le chant de l’Alleluia. Dans l’Eglíse grecque, on le chante indifféremment tous les dimanches et jours de fête, sans en excepter le Carême ; il n’était même pas supprimé dans les funérailles, comme S’Jérôme le témoigne å. propos de celles de S” Fabiole. Dans l’Église latine, on n’employa d’abord l’Alleluía qu’au temps pascal, S’Grégoire le Grand ordonna qu’on le chanterait toute l’année ; mais ce chant a été supprimé par le 4° concile de Tolède dans Poffice des morts, et, par ordre du pape Alexandre II, on ne le dit plus depuis la Septuagésime jusqu’au graduel de la messe du samedi saint, et on lui a substitué les mots : Laus tibi, Domina, reœ œternœ glorzœ. Cettècessation du chant de l’Alleluia dans l’ollice à certaines époques était jadis appelée l’Alleluia fermé (ÿlauwml 014 les obsèques alldlmatiques (alleluiqticœ eœsequiœ) ; elle donnait lieu. dans plusieurs églises, å une cérémonie particulière (V. Fare na IÎALLELUIA, dans notre Dictionnaire de Biographie et d’Histoíre). Lesamedi saint, jour où l’on reprend l’Alleluia, ce fut une coutume, dans quelques diocèses, d’envoyer réclamer l’Alleluia. nouveau, de paroisse en paroisse, par quelque clerc novice ou de peu d’intelligence. Ailleurs, au moment de la reprise de l’Allelula, on lachait un oiseau, dit Alleluia, portant au cou un ruban couleur de feu, et que la fabrique nourrissait dans l’église pendant le temps pascal. Alleluia fut autrefois un cri de guerre dans la Saxe.— Quelquefois le mot Alleluia fut employé dans le sens d’ambon, de jubé, parce que c’était la d’ordinaire qu’on chantait l’Alleluia. B.

ALLEMAGNE (Architecture en). Les anciens Germains n’avaient aucune idée des beaux-arts. Suivant Tacite, ils ne bâtissaient point de temples, et leurs demeures étaient des masses informés en terre. De grossières idoles, placées au fond des forêts, au milieu d’un’assemblage de pierres irrégulières, sur lesquelles coulait parfois le sang humain ; des armes et des ustensiles de ménage in habilement fabriqués ; des espèces de dolmens (V.CELTIQUES-Monuments) ou de monuments funéraires, appelés Hünenbetlen (lits de morts ou de héros) : voilà tout ce qui subsiste de ces temps primitifs. Les Romains apportèrent la civilisation en Germanie ; on fit alors quelques statuettes de bronze, imitées des statues romaines ; des temples de bois s’élevèrent, notamment chez les Marses, tribu la plus rapprochée de la frontière des Gaules. De bonne.heure, la rigueur du climat et les intempéries des saisons firent adopter les constructions a toit élancé, qui devaient faciliter l’écoulement de la pluie et des neiges fondues. L’art était encore à son début, quand la prédication chrétienne vint adoucir les mœurs, éclairer et féconder les esprits. Les missionnaires’apportèrent d’Italie le goût et les principes de l’art byzantin ; les évêques élevèrent des chapelles et des monastères. S’Boniface, le grand apôtre de la Germanie, bâtit, en 724, l’église d’Altenberga (près de Gotha) et le monastère de Fulde ; on conserve de lui, à la bibliothèque de Munich, un livre de prières orné de miniatures, qu’il apporta sans doute d’Italie, mais qui dut en donner le goût et en provoquer l’imitation.

L’art est venu d’Italie et d’Orient en Germanie ; mais cette semence s’est développée d’une manière originale. Charlemagne appela à sa cour les artistes de Rome et de Byzance, bâtit à Aix-la-Chapelle une église et un pa » lais qui surpassaient en beauté les constructions antérieures de l’Occident, lit exécuter, sur des modèles grecs, une foule de reliquaires, vases sacrés, évangéliaires ornés de miniatures, et établit des écoles de chant sous la direction de maîtres venus d’Italie. Les successeurs de Charlemagne l’imitèrent ; les monuments religieux s’élevèrent de tous côtés ; des abbés de la Germanie, fréquemment appelés en Italie, en rapportaient de nouvelles connaissances. S’Boniface avait institué parmi les moines une classe a part, celle des opérarii ou magístri operum, qui devaient exclusivement s’occuper de travaux d’art. Les guerres civiles et les incursions des Hongrois au x° siècle auraient étouffé ces germes naissants de civilisation, si les moines.ne les eussent ~recueillis et conservés dans leurs asiles respectés ; les couvents où l’art se réfugia furent ceux de S’-Gall, de Fulde, de Mayence. de Batisbonne, de Trèves, de Lorch, d’Hildesheim, de Quedlimbourg, etc. La maison de Saxe imprima un nouvel élan aux arts, et l’exploitation des mines du Hartz donna une surabondance de métaux qui contribua aux progrès de la fonte, de Porfévrerie et de la ciselure. Les alliances des souverains avec les princesses d’Orient firent encore pénétrer plus au cœur de l’Allemagne la civilisation byzantine, dont bientôt le goût et le caractère se retrouvèrent dans les œuvres des artistes allemands. Toutefois, l’influence des idées de l’Qccident niodifia les formes byzantines ; c’est ce qu’on remarque dans les églises romano-byzantines des bords du Rhin, à Spire, Worms, Mayence, Memmingen, Bale, Limbourg ; Trèves, Erfurt, Wurzbourg, Nuremberg, etc. Sous la dynastie de Franconie, les villes grandirent, arrivèrent a l’indépendance, et s’emparèrent du mouvement intellectuel ; l’art se sécularisa, et lorsque Rodolphe de Habshourg monta sur le trône (1273), il était passé des mains des moines å celles des bourgeois. Au retour des croisades, des compagnies de francs-maçons s’organisent, et, avec eux, le système architectural se transforme : laissant de côté les traditions orientales, ils cherchent des formes plus en rapport avec la climat et les rflfifiaurtas