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LE SERVITEUR

touffes de poils au creux des oreilles et des narines, portent des soutanes sales et des chaussures de paysans, il se tient droit, ne prend pas de corpulence, et ses cheveux longs qui commencent à grisonner lui bouclent sur la nuque. Son père, toute la petite ville le connaît, et ne l’appelle que « le père Pesle. » Quelques saintes âmes, qui s’offusquent de ce que l’on traite si familièrement « le père de M. le Curé », ne lui disent jamais que « M. Pesle » et ne lui parlent qu’avec déférence. Il n’en est pas émule moins du monde. Il aime mieux les hommes qui lui tapent sur l’épaule en disant : « Eh bien, père Pesle, si nous allions boire le vin blanc ? » Car il a un faible pour la bouteille. Jusqu’à l’âge de cinquante ans, il a exploité une ferme à vingt-cinq lieues de chez nous. Il a été le maître qui fait le tour de ses domaines, guêtre de cuir, la pipe à la bouche et les mains dans les poches, n’ayant pour occupation que de distribuer le travail. Encore fallait-il qu’aux moments de presse il mit la main à la pâte. Depuis que son fils a été nommé chez nous curé-doyen, il se repose, ne faisant plus œuvre de ses dix doigts, sciant de temps à autre une bûche pour se