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LE SERVITEUR

invités furent les Girard. Je regrettais qu’on ne dînât point dans notre « maison de village » et que le Bibi de la Maladrerie, avec son couteau, ne fût point parmi les invités. Mais les Girard avaient droit à certains égards.

L’hiver n’est pas seulement sur notre maison. Toute la petite ville est envahie par la neige. De temps en temps, peut-être pour se réchauffer, les cantonniers passent avec un traîneau en forme de coin, tiré par un âne, et qui, tant bien que mal, fait sa trouée le long des rues, des chemins et des routes jusqu’aux dernières maisons de chaque faubourg. Après, c’est la solitude des bois : à la grâce de l’hiver !

Viens avec moi jusqu’aux premiers arbres ! Gercé, fendu, le sol des sentiers creux sue de la glace comme les sapins, en été, suent de la résine. L’air froid pique comme des milliers d’aiguilles fines. Si tu glisses, ne compte pas sur les branchettes pour te retenir ; gelées, elles cassent comme verre.

Sur les chênes, tu verras encore des feuilles, mais si jaunes qu’elles semblent être artificielles, comme si, de zinc, elles s’étaient rouillées sous les pluies du dernier automne. Plus rien de