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LE SERVITEUR

pagne du pauvre. Il y a plus d’un chaland : et l’on entend tourner les blanques qui grincent. Il y a beaucoup d’enfants : et les deux manèges de chevaux de bois gagnent de l’argent. Il y a beaucoup de monde : et l’on voit des blouses bleues, des casquettes, des sabots, des bottines, des chapeaux, des redingotes. On marche. On piétine. On entre sous les ramées. On stationne devant les étalages. On cause. On s’interpelle. On rit. On fume. On danse sur le parquet installé de la veille. Bonoron n’est plus seul ; il est renforcé d’un cornet à pistons et d’une basse. On l’entend un peu moins, mais personne ne songe à s’en féliciter. Parfois une vielle grince. La vielle, c’est un peu la voix de notre pays gris l’hiver et toujours rude. Même la voix de la vielle ne te dit rien.

J’aurais beau te tirer par la manche : tu ne viendrais pas. Tu me dis :

— Ce n’est pas moi qui ferais seulement un pas pour voir ça.

Ce premier pas, tu ne pourrais point le faire. Et les dix-neuf autres te coûteraient bien plus encore.

Non. Décidément, tu n’étais point fait pour te