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LE SERVITEUR

lourd et doré devant le tabernacle. Flottant sur une rondelle de liège, elle baignait dans l’huile que tu renouvelais le soir, après avoir sonné l’Angélus. Quelquefois je t’accompagnais dans l’église envahie par l’ombre comme elle l’est à cette heure même où je cause avec toi. Tu n’avais pas peur. Mais, moi, si tu ne m’avais pas tenu par la main, je me serais enfui. J’avais la sensation d’être… Où donc ? Au ciel ? À huit ans, cela ne m’eut pas fait trembler. Non. Je m’imaginais transporté dans un pays mystérieux où, soudain déchaînées, des forces inconnues pouvaient jouer de moi comme la tempête d’un fétu de paille. Mais, tant que tu me tenais par la main, je me sentais solidement enraciné. J’aurais voulu ne pas te suivre jusque dans le chœur où j’allais être en contact direct avec la puissance de Dieu ; seulement la peur de rester isolé était la plus forte. Lorsque, te haussant sur la pointe des pieds, tu attirais à toi le lustre, il se faisait dans l’église comme un bruit de tonnerre. Là-haut, au-dessus de la voûte, les poids remontaient, cédant à ta force. Et c’était pour moi comme si tu avais ébranlé la voûte du ciel.

Mais le clocher est la tête de l’église. Munies