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LE SERVITEUR

mur du cimetière. Il fait toujours le même clair de lune : toute la terre en est ennoblie, jusqu’à ce sentier où je marche et que tant de fois tu as suivi ; j’en compterais tous les brins d’herbe. Mais je vois aussi les maisons, les rochers et les bois comme fondus ensemble dans un doux apaisement. Oui : nous avons le temps de causer. Il n’y a même plus besoin que nous soyons, comme autrefois, assis à la même table. Maintenant je te vois et je t’entends mieux. Ta mort, comme ce clair de lune fait de la terre, illumine pour moi toute ta vie.

Tu n’aimais ni la médisance, ni la calomnie, ni le mensonge, mais tu médisais du toi, tu te calomniais, tu te mentais à toi-même.

Riche de mérites, tu t’en disais pauvre. Fort, tu t’estimais faible.

Priant sans cesse, tu trouvais que tu ne priais jamais assez.

Tu ne tenais pas à te reposer, et tu te reposais le dimanche en travaillant pour Dieu. Tu ne doutais pas qu’il ne dut tenir ses promesses, mais tu doutais que tu eusses assez fait pour en être digne.

Te priver des fêtes des hommes, il ne t’en