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LE SERVITEUR

fument, et tape des sabots contre les portes qui tremblent mais résistent. Leur destinée était de se reposer ici, où ils ont pris rang pour le jour de la résurrection dans la vallée de Josaphat.

Il y a là de ces vieux et de ces vieilles qui à partir de soixante ans n’avaient plus d’âge, et qui n’apercevaient pas à l’horizon l’aube du jour où ils pourraient cesser de travailler. Les hameaux, les villages, la petite ville s’étaient habitués à leur va-et-vient, même lorsqu’ils marchaient avec le fraternel appui de deux bâtons noueux comme eux. La mort leur a fait signe en temps voulu. Mais, comme les jeunes gens, comme les jeunes filles, ils n’ont répondu que par un gémissement à son appel. Et ils sont venus ici prendre rang, pour le jour de la résurrection dans la vallée de Josaphat.

Sans doute pourrais-je dire qu’absorbé dans une muette douleur je restai longtemps yeux baissés, comme quelqu’un qui songe. Mais non. Je n’ai pas regardé que ta tombe.

Je les ai toutes vues, soudées d’en dessous les unes aux autres comme les alvéoles d’une ruche, et de dessus, toutes également visitées