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INTRODUCTION.

au dos, pareille à ces bayadères qu’Offenbach a fait paraître dans le ballet des Mouches de l’Orphée aux Enfers. « Empruntant la figure d’une fille affétée, qui estoit honteusement découverte, le démon sollicitoit de nuict ce saint solitaire à des actions criminelles, qui de leur seule pensée font rougir les âmes chastes. » C’est ainsi que le moine Simon Martin explique cette gravure[1].

Dans le roman de M. Gustave Flaubert[2], c’est la reine de Saba qui tente le Saint. Elle arrive couverte de pierreries et entourée d’une cour splendide. Elle compare sa beauté à celle des autres femmes : « Toutes celles que tu as rencontrées, lui dit-elle, depuis la fille des carrefours chantant sous sa lanterne, jusqu’à la patricienne effeuillant des roses du haut de sa litière, toutes les formes entrevues, toutes les imaginations de ton désir, demande-les ! Je ne suis pas une femme, je suis un monde. Mes vêtements n’ont qu’à tomber, et tu découvriras sur ma personne une succession de mystères. »

Eh bien, cette légende de la tentation de saint Antoine n’était pas inconnue aux poëtes kawi, et le Wiwoho, le poème javanais dont nous avons déjà parlé, mentionne un pénitent qui se livrait sur une montagne à d’austères macérations :

« Batoro Hendro ne sait pas encore si Hardjouno

  1. Fleurs de la solitude, p. 175.
  2. La Tentation de saint Antoine.