Page:Bacon - Œuvres, tome 1.djvu/250

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dans leurs livres[1]. En effet, l’esprit humain, lorsqu’il opère sur une matière bien réelle, en contemplant les œuvres de Dieu et de la nature, est, dans son travail, dirigé par cette matière même ; et elle lui fait trouver un terme, une fin[2]. Mais, quand il revient sur lui-même, semblable à l’araignée, qui forme sa toile de sa propre substance, alors il n’est plus de fin pour lui, et il ourdit certaines toiles scientifiques, admirables sans doute par la finesse du fil et la délicatesse de la main-d’œuvre ; mais tout-à-fait frivoles et sans utilité.

Or, cette subtilité excessive et cette inutile curiosité est de deux espèces, et on l’observe, ou dans la matière même,

  1. C’est ce qui s’applique singulièrement à Thomas d’Aquin, à Scott, au grand Albert, à Bernard, à Abailard : que de génie perdu !
  2. Parce que le monde réel est lui-même fini, borné ; au lieu que le monde imaginaire est infini ; et pour une seule manière dont une chose est réellement, on peut imaginer mille manières dont elle semble être et dont elle n’est pas.