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Page:Bacon - Œuvres, tome 3.djvu/290

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certains amis, qui n’osent user du privilège de l’amitié pour reprendre librement et courageusement leurs amis, tant par rapport aux fautes que ceux-ci peuvent commettre, que relativement aux risques qu’ils courent. Que faire, dit ordinairement tel de ces amis si mous, quel parti prendre ? je l’aime autant qu’il est possible ; et s’il lui arrivoit quelque malheur ; je me mettrois volontiers à sa place mais je connois soit humeur ; si je lui parle trop librement, je le choquerai, ou tout au moins je l’affligerai, et je n’en serai pas plus avancé : l’effet de mes remontrances sera plutôt de me brouiller avec lui, que d’arracher de sa tête ce qui y est comme cloué. Salomon condamne un ami de cette trempe, à titre d’homme sans nerf et sans utilité, et prononce qu’on tire plus de fruit d’un ennemi déclaré, que d’un tel ami ; car cet ennemi peut, pour vous humilier, vous dire hautement ce qu’un ami trop indulgent oseroit à peine vous dire à l’oreille.