Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/136

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l’autre jour si j’avais des bateaux à vous offrir pour remplacer ceux qui vous manquent et des auxiliaires indigènes pour vous tenir lieu de ceux dont vous avez besoin. Je ne vous ai rien répondu sur le moment, mais aujourd’hui je viens vous dire qu’il y a en rade de Majunga, à l’heure qu’il est, un brick marchand, cinq chalands, deux baleinières, vingt-cinq pirogues, dix chaloupes et dix-huit boutres arabes de cinquante tonnes chacun, le tout m’appartenant ou loué par moi ; qu’en outre, devant la maison que j’habite, au quartier de Marofotona, six cents indigènes vigoureux et bien portants, amenés par moi de Manakarana ou des environs, se trouvent réunis. Embarcations et indigènes sont à votre service, mon colonel, et attendent vos ordres.

— Ah ! » fit le colonel en montant sur le cheval qu’un planton lui amenait ; et, regardant le vieux Daniel en face, il ajouta ce simple mot : « Combien ? »

Daniel devint cramoisi jusqu’à la racine des cheveux ; mais, se contenant :

« Mon colonel, dit-il, je me nomme Daniel Berthier-Lautrec, négociant à Manakarana. Bien que j’aie quitté mon pays depuis de longues années, je n’en suis pas moins resté aussi bon Français, aussi bon patriote que personne. Je ne vous vends ni ne vous loue mes bateaux ni mes hommes ; je les mets simplement à votre disposition, sans vous demander pour cela aucune rétribution ni indemnité.

Cela fut dit avec une si parfaite dignité que le colonel en fut retourné du coup. Jetant les guides de son cheval au planton, il mit pied à terre et, tendant la main à l’oncle Daniel :