Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/182

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entravés, hors d’état de résister et de se défendre, ce prisonnier fût-il d’ailleurs le dernier des misérables.

En revanche, Naïvo, dont la nature beaucoup plus simpliste n’aurait rien compris à ces subtilités, arriva l’un des premiers sur le lieu de l’exécution, choisi près du village indigène, à la lisière d’un petit bois de tamariniers, et il ne quitta la place que lorsque l’expiation eut été entièrement consommée. Sa face ordinairement plutôt bonasse avait encore un rictus féroce lorsqu’au retour il vint me raconter ce qu’il avait vu : d’abord, au petit jour, les six pelotons commandés chacun par un sergent venant se placer à quinze mètres des six piquets plantés devant les tamariniers, à dix mètres de distance les uns des autres ; puis les troupes présentes à Ankaboka arrivant, clairons en tête, et se déployant en carré, en arrière des six pelotons, la quatrième face du carré étant formée par la ligne des piquets d’exécution ; sur un petit tertre, en face de cette même ligne, tous les officiers, à leur tête le colonel Bailloud, de passage à Ankaboka, et le commandant de la Guillonnière, qui venait d’y arriver pour prendre les fonctions de commandant d’armes ; puis, à côté, le roi Salima et les chefs des différents villages sur le territoire desquels avaient été commis les crimes qui allaient être châtiés ; à six heures et demie, annoncés par une sonnerie de clairon, les six condamnés apparaissant, au milieu de leur escorte, et venant se placer le dos contre les piquets, auxquels on les lia par des cordes après leur avoir bandé les yeux ; le capitaine Deniau, de la 8e compagnie du 200e, faisant fonction de commandant d’armes, s’avançant devant les condamnés et leur lisant leur sentence en langue malgache, sans qu’ils manifestassent