Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/270

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de Hovas, qui se découvrent devant nous avec un empressement respectueux plus ou moins sincère. De leur côté, comme du nôtre d’ailleurs, silence absolu. Que d’armes et de munitions ! On ne voit partout que des fusils en tas, des barils de poudre, des mitrailleuses anglaises, belges et même françaises, etc. Un moment, nous sommes arrêtés par une barricade en maçonnerie, derrière laquelle s’ouvrent les trous noirs de deux canons-revolvers ; il faut envoyer chercher des soldats du Génie pour y pratiquer une brèche. Enfin nous arrivons sans encombre sur la place d’Andohalo, où nous nous arrêtons. Henri, très fier de connaître la ville, m’en fait les honneurs ; il me nomme au passage les principaux palais, la maison qu’il avait habitée avec ses parents, puis, sur la Place même, l’école des sœurs, la cathédrale catholique et la maison de M. Suberbie.

Il est six heures ; nous sommes harassés de fatigue, mais ce n’est pas encore le moment de nous reposer. Le Général-gouverneur fait parvenir aux autorités l’ordre d’interdire absolument à la population de circuler pendant la nuit ; puis il envoie les divers bataillons occuper les points importants de la ville. Ce n’est qu’à une heure assez avancée que nous sommes libres enfin de nos mouvements. Mais où aller ? Nous nous logeons tant bien que mal dans un temple protestant, avec les bancs des fidèles pour lit et leurs coussins pour matelas. De vivres point ; nous partageons fraternellement un biscuit, Henri et moi, et nous finissons par céder au sommeil ; mais nous ne dormons que d’un œil, et de temps en temps je me lève pour aller voir si tout va bien. Mais, baste ! une nuit de fatigue est bientôt passée, même après une journée