Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/34

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— Tu partirais avec moi bras dessus bras dessous pour Tananarive, comme s’il s’agissait de Saint-Germain ou de Fontainebleau ?

— Parfaitement, les yeux fermés.

— Et tes enfants ?

— Qui nous empêcherait de les emmener ? Henri aura dix-huit ans le mois prochain ; Marguerite vient d’en avoir seize ; ils sont tous les deux bien portants et ne courraient certainement pas plus de risques que nous-mêmes.

— Mais alors, vraiment, tu me conseilles d’accepter la proposition de l’oncle Daniel ?

— Je ne te conseille ni de l’accepter, ni de la refuser. Je t’engage seulement, avant de prendre un parti, à réfléchir mûrement ; voilà tout. Ce que tu auras décidé sera bien ; seulement, si tu pars je pars avec toi.

— Mais, ma pauvre Marie, te doutes-tu de ce que peut être pour une femme de se voir brusquement arrachée à son intérieur, à ses amis, au pays qu’on n’a jamais quitté pour ainsi dire, au climat même auquel on est habitué depuis l’enfance ?

— Hésiterais-tu cependant à quitter tout cela, s’il le fallait ? Non. Pourquoi donc aurais-je moins de courage ? N’est-ce pas mon devoir, d’ailleurs, de te suivre ? et, en même temps, n’est-ce pas le parti le plus raisonnable et le plus sage ? Où que nous allions, ne trouverons-nous pas toujours le moyen de nous créer un nouveau foyer, moins élégant, moins confortable sans doute que le nôtre, mais qui nous suffirait, puisque nous serions ensemble ?

— Tiens ! tu es un ange, Marie, et tu me donnerais presque envie d’accepter, pour avoir la joie de te voir sous