Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/271

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croyant pas qu’il y eût rien de honteux pour luy, ni rien d’indigne de sa condition dans une pratique qui étoit tres-innocente en elle même, et qui pouvoit devenir trés-utile dans ses effets. Aussi se mocqua-t’il des reproches de quelques esprits mal-faits parmi ses envieux, qui prétendant se divertir aux dépens de sa réputation, avoient tâché de lui en faire un crime, et l’accusoient d’aller par les villages pour voir tuer des pourceaux

quoique le fait fût

absolument faux en ce qui regarde les villages. Il faut avoüer qu’il lisoit peu alors, et qu’il écrivoit encore moins. Il ne négligea pourtant pas de voir ce que Vesalius, et quelques autres auteurs des plus expérimentez avoient écrit sur l’anatomie. Mais il s’instruisit d’une maniére beaucoup plus sure en faisant lui-même la dissection des animaux de différentes espéces : et il découvrit par sa propre expérience beaucoup de choses plus particuliéres que celles que tous ces auteurs ont rapportées dans leurs livres. Il continua plusieurs années dans cét éxercice, en diversifiant néanmoins ses occupations par d’autres études. Son éxactitude alla si loin dans l’éxamen des moindres parties du corps de l’animal, que pas un médecin de profession ne pouvoit se vanter d’y avoir pris garde de plus prés que luy. Il assuroit au P Mersenne qu’aprés dix ou onze ans de recherches qu’il avoit faites dans l’anatomie, il n’avoit trouvé aucune chose si petite qu’elle parût, dont il ne crût pouvoir expliquer en particulier la formation par les causes naturelles, de même qu’il a expliqué celle d’un grain de sel où d’une petite étoile de neige dans ses météores. Mais aprés un nombre infini d’expériences et une assiduité de tant d’années pour cette sorte d’étude, il n’eut pas la vanité de se croire encore capable de guérir seulement une fiévre. Ce long travail n’avoit produit en lui qu’une connoissance de l’animal en général, qui n’est nullement sujet à la fiévre. C’est ce qui l’obligea dans la suite à s’appliquer plus particuliérement à l’étude de l’homme qui y est sujet.

Il joignit l’étude de la chymie à celle de l’anatomie dés la fin de l’an 1629 ; et il témoigne qu’il apprenoit tous les jours dans cette science comme dans l’autre quelque chose qu’il ne trouvoit pas dans les livres. Mais avant que de se