Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/410

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de M Descartes, les autres n’étoient pas assez connus de luy, si l’on en excepte deux illustres géométres, au jugement desquels il pouvoit sûrement s’en rapporter.

Ces deux personnages étoient M Mydorge et M Hardy, qui étoient reconnus publiquement pour ses intimes amis.

Cette considération ne les rendoit pas moins récusables à M De Fermat, que M Pascal et M De Roberval l’étoient à M Descartes pour leur amitié avec M De Fermat. Il fallut donc se résoudre à les choisir non pour ses juges, mais pour ses avocats ; ou pour parler aux termes du cartel présenté par M De Fermat, M Mydorge et M Hardy furent retenus par M Descartes pour être ses seconds, et pour être opposez à M Pascal et à M De Roberval, qui s’étoient offerts à M De Fermat pour le seconder dans le combat. Le P Mersenne fut prié de demeurer dans la neutralité, et de se contenter de la fonction de simple spectateur, afin de ne devenir suspect à aucun des partis dans les services qu’il pourroit rendre aux uns de la part des autres. M Descartes le souhaitoit ainsi en cette rencontre comme dans toutes les autres, suivant les égards et les ménagemens dont il usoit ordinairement auprés du P Mersenne, de l’amitié duquel il ne prétendoit pas abuser ; et il avoit soin sur toutes choses de ne jamais commettre mal à propos ny sa personne ny la sainteté de sa robe. Vous ne devez pas craindre, dit-il à ce pére, que les avis que vous aurez la bonté de me donner touchant ce qui se dira contre moy, tournent jamais à vôtre préjudice. Car il n’y a rien que je ne souffrisses plûtôt que de vous intéresser dans mes querelles. Mais je m’assûre aussi que de vôtre côté vous ne voudriez pas me tenir les mains pendant qu’on me bat, pour m’empêcher de me défendre : et ceux qui vous donnent des objections contre moy ne peuvent raisonnablement s’en prendre à vous des réponses que j’y feray, ny se fâcher que vous me les envoyiez. Car sçachant l’affection que vous me portez, ils ne vous les peuvent donner à d’autres fins que pour me les faire voir : et toute la civilité dont j’ay crû pouvoir user jusqu’icy envers M De Fermat, a été que j’ay feint d’ignorer son nom, afin qu’il sçache que je ne répons qu’à son écrit, et que vous ne m’avez envoyé que ses objections, sans y engager sa réputation.