Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/164

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Le chef (pique une tête). — Vous pensez à ma copie, Monsieur Sinet.

Geste désespéré de M. Sinet qui n’a rien.

M. Sinet. — Au fait, si. (Il ouvre son tiroir à ressources, en retire quelques feuillets visiblement défraîchis). — Prenez ceci : deux colonnes, première page. Voilà trois mois que ça traîne.

Le chef (qui connaît le métier). — Ben alors, c’est comme neuf (Exit).

Nouveau silence. M. Sinet ouvre quelques enveloppes, lit, rature, colle. La pancarte poursuit son discours sur les minutes qui sont brèves.

L’horloge, avec reproche. — Dix heures ! (Elle, sonne un gros coup.)

Bruit de pas dans le couloir. Ils voudraient être légers, mais l’homme qui les fait est lourd. On entend une voix qui rigole : « Tiens ! une pancarte », puis cette même voix qui jure : « Ah ! nom de Dieu ! les cochons !… » Le temps de s’arranger comme s’il était là depuis longtemps, Jean Lhair paraît. Gros ventre, crâne qui brille : une bonne tête. L’expression du petit enfant qu’il n’est plus, et de l’homme mûr, qu’il est hélas ! Sa bonne tête ne demande qu’à rire, mais aujourd’hui, après cette pancarte, tout ce qu’elle porte de graisse, de peau, de rides, pend avec l’air de pleurer.