Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/29

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Cela ne s’inquiète pas, comme un civil : « Que diront les camarades ? » Cela ne demande qu’une chose : ne pas vider trop sa bourse et ne pas craindre qu’à la visite le major dise : « Salaud, où avez-vous attrapé cette vérole ? » Quant à cela, elle était propre. Et puis ne trouvez-vous pas ? Si loin de chez soi, le militaire c’est un peu comme une orpheline : elle était la religieuse de ces orphelines.

Oh ! pas pour tous ! Une fois, il vint un lieutenant. Elle dit :

— Monsieur l’officier, je ne suis pas assez savante pour vous.

Faire ça de son corps avec un homme qui portait sur le sien un beau costume, en belle étoffe, avec des étoiles, elle n’aurait pas osé. Avec les sous-officiers non plus. Ceux-là aussi étaient trop beaux. Ils avaient à leur disposition la demoiselle du Gros Canon, une mauvaise fille par malheur qui n’éteignait pas toujours ce qu’elle allumait. Non, ceux qu’elle recevait, c’était, humbles comme elle, les simples petits soldats. Elle préférait les recrues.

Pauvres petits ! Ils venaient de leur pays. Ils avaient quitté leur maman, peut-être une amie. Ils étaient tristes, ils s’ennuyaient. Pour peu, ils se