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sa femme, il t’en sera resté un brin dans les yeux.

Peut-être bien après tout.

Pendant la matinée, il ne songea à rien. Il battait pour le quart d’heure le blé du fermier Simonon ; il ne s’agissait pas de flâner à l’ouvrage, car la récolte avait été bonne. Sur le coup de midi, il eut besoin de son pain qu’il avait mis au frais dans la grange et, sitôt qu’il eut passé de la pleine lumière dans le noir, il revit son soleil dans l’œil gauche. Cela ne dura pas d’ailleurs : le temps de prendre son pain, de revenir au jour, le petit soleil avait disparu.

La journée finie, le père François ne dit rien à sa femme : elle s’était moquée une première fois, il n’allait pas lui donner l’occasion de se moquer une nouvelle fois. Mais quand il se coucha :

— Écoute, fit-il, ce tantôt en cassant la croûte et maintenant pendant que je te parle, j’ai un petit soleil dans l’œil gauche.

— T’auras trop regardé la lumière.

Et elle se mit à rire.

Le lendemain, il se surveilla. Il s’arrangea pour se tenir à l’ombre, il évita de regarder les flammes qui dansaient dans l’âtre ; à la soirée,