Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/203

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maient ! C’est la première fois, maman, que je vois des tilleuls.

Je m’enfermai dans ma chambre, je me mis au lit. Comme autrefois mes souvenirs de Provence, j’étalai devant moi ce dimanche ; mon départ si penaud, la cravate de Dupéché, les phrases de Jeanne, le sourire de Jeanne. Ce qu’il y avait de triste, ce qu’il y avait de laid, je ne voulais plus y penser : « Mais non ! Vous avez cru bien faire. Je vous remercie. » Et Charles ? Eh oui ! On n’avait pas prononcé son nom. « Il !… Lui… le malheureux. » Être mort qu’était-ce donc ? Ce n’était pas simplement descendre dans une fosse, être un corps dont la barbe continue de pousser. C’était devenir « il… lui… le malheureux » pendant qu’une Jeanne vivante marche à côté d’un Marcel, s’attriste un peu, sourit et dit merci.

À cet instant, je reconnus la voix de Dupéché.

— Que crains-tu ? Tu sais bien que…

Je ne le vis pas. J’éclatai de rire :

— Cela ne prend pas, vieux. Existe, n’existe pas, je m’en moque.

Je me réfugiai dans Jeanne. Quelle voix douce ! Ce bon regard de compassion ! Pas une compassion qui se moque. « Votre lettre ? Pas pour moi. » Et ma joie, parce qu’elle ne