Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/234

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exaltation me restait de la nuit. Mes prières ne furent certes pas de simples Ave Maria. Ensuite, parce que j’avais prié, je voulus me confesser. Je dus attendre un prêtre, j’eusse attendu jusqu’à la mort. Examiner ma conscience. Oh ! je la connaissais. Je racontai tout, avec minutie, comme on passe et repasse un chiffon quand on veut son isba propre. Je dis d’abord le plus gros : le secret de ma tante :

— C’est bien, mon enfant.

Je dis la petite brune de la foire de Neuilly ; je dis les autres, Nelly, la bourrique, mes pensées, la première communion, le perce-oreille.

— C’est bien, mon enfant.

J’eusse préféré que tout ne fut pas bien. À la fin, un grand signe de croix m’envoya l’absolution.

— Ne recommencez plus. Allez en paix.

J’étais heureux ou je m’efforçais de le croire, parce que, au fond, je ne l’étais pas tant que cela. « Nettoyé, réconcilié, libéré ». Je me répétais ces mots. Je pensais aux histoires de l’oncle. L’ours, pour voler le miel, repoussait le bloc de bois et ce bloc lui retombait sur le museau. Moi j’avais repoussé le bloc, j’avais tendu mon âme et rien ne m’avait dérobé le miel qu’est le pardon de