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d’hommes que de femmes. Mais il y a toujours beaucoup de gosses.

Ces femmes, que sont-elles à ces hommes ? Sœurs, cousines, ou épouses, on ne sait. Peut-être un peu de tout cela en même temps.

Les gosses jouent avec les chiens, ceux-ci revêtus de leur poil comme ceux-là de leurs nippes. Mais tandis que pour les bêtes on hésite, pour les enfants ou voit tout de suite si l’on a à faire à la petite sœur ou à son petit frère.

Les grandes, quand elles ont arrangé la frange de cheveux qui doit se trouver sur le front, le reste peut pendre, elles sont coiffées. Pour se vêtir, elles aiment les couleurs éclatantes, le rouge qui fait bien dans les arbres, le vert qui accompagnera ce qu’elles ont déjà de rouge. D’ailleurs, elles ne sont pas difficiles ; qu’une haie au passage, leur offre quelque frusque ni rouge ni verte, « Merci bien », elles l’acceptent.

Les hommes s’habillent comme tout le monde, en plus sale pourtant, avec un grand luxe de trous et de déchirures. Il n’y a qu’une chose ; pour être tout à fait beau, le pantalon doit s’évaser par le bas. Ils travaillent de préférence à rien ne faire.

Les femmes sont plus actives. Pieds nus, ne cachant rien de leurs mollets, elles vont, d’une ferme à l’autre, présenter des crayons, du cirage, ou simplement la main qu’on la remplisse de quelque chose. Comme les artistes de théâtre, elles ont deux figures : l’une que le Bon Dieu leur a faite et qui sert chez eux, l’autre qu’elles s’arrangent, avec des yeux qui pleurent, pour attendrir les gens. Pendant qu’elles vous occupent à vous la montrer sur le seuil, les marmots vérifient dans la cour si rien ne traîne.

Les paysans n’aiment pas ces maraudeurs. Ils leur répondent avec rudesse et ce qu’ils leur abandonnent, on le prendrait tout de même. Il est beaucoup plus simple de ne pas les croire des voleurs.