— … du lait chaud.
— Garçon !…
— Boum, Messieurs ! Je sais.
Le garçon apportait nos laits chauds.
— Tout de même, rêvait Villiers. Regarde ton voisin. C’est un bourgeois, mais ce qu’il s’en tasse une !
— Oui, vieux, et soignée. Elle embaume !
— Si on en risquait une.
— Tu crois ?… Mais alors, rien qu’une petite.
— Oh ! toute petite !… Garçon !
— Boum, Messieurs ! Je sais.
Il enlevait d’abord les laits chauds.
En ce temps, on buvait encore de l’absinthe. Celle que nous prenions avait deux particularités. La première : qu’en chauds antibourgeois comme nous l’étions, nous devions l’avaler d’un seul trait — et sans eau. Ensuite : qu’une absinthe, ainsi prise, pouvait être dangereuse, si nous ne la noyions aussitôt dans une seconde… Après quoi, venaient les suivantes. De tels principes sont dangereux : à la nuit, nous rentrions saouls.
Un soir, nous en étions à la troisième absinthe. Villiers défendait les vers, je défendais la prose.
— Tiens, s’interrompit Villiers, voilà Loideau qui passe.
— Loideau ? Qui ça ? Loideau ?
— Loideau, le poète, voyons.
— Poète ? Peuh !
— Oui ! mais qui écrit en prose.
— Prose ! Appelle-le, alors. Hé ! Loideau !
Loideau entra : grande lavallière, veston de