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distinctement aux tributs ne paraît point admissible. Elle est contraire aux anciens monuments historiques et aux idées fières des guerriers de la Germanie, dont certaines peuplades n’étaient pas dégradées par le joug des impôts[1]. Conservant les mêmes mœurs après la conquête, les Francs voulaient toujours que les dons faits par eux aux princes fussent accordés de leur libre volonté, des dons de bénévolence. Le plus ancien historien des Francs, Grégoire, évêque de Tours, qui vivait dans le sixième siècle, et les continuateurs de sa Chronique, témoignent, dans plusieurs passages, que cette prérogative se conserva sous les rois de la première race, et que les tentatives faites pour la violer furent repoussées comme un attentat, non au droit public, qui n’était point établi, mais aux coutumes germaniques que les vainqueurs avaient introduites avec eux. Childéric, père de Clovis, ne fut chassé que pour avoir voulu enfreindre ces coutumes; un Franc, nommé Bodillon, attenta à la vie de Childéric II, roi d’Austrasie, par l’ordre duquel il avait été attaché à un poteau et battu de verges pour lui avoir représenté qu’il n’avait pas le droit d’imposer des taxes au mépris des règlements qu’une assemblée venait de faire pour la réforme des abus; et l’un des crimes imputés à Brunehaut fut d’avoir grossi le fisc des biens des chefs des Francs[2].

Le juge Audon était l’un des instruments dont se ser-

  1. Esprit des lois. — Hist. de France, parle comte de Boulainv. - Sully, Économies royales, t. 10, p. 179. - Mézerai. - Chronique d’Aimoin, moine de Fleury, trad. de Sauvigny, t. 5, p. 491.
  2. Nec tributis contemnuntur, nec publicanus atterit. Exempti oneribus et collationibus. (Tac. De morib. Germ., cap. ng.)