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vaient Chilpéric et Frédégonde pour établir leurs exactions. De concert avec le préfet Mummius, ce juge avait assujetti à des exigences plusieurs des Francs qui, du temps de Childebert l’Ancien, en étaient exempts en qualité d’hommes ingénus ou libres. Après la mort de Chilpéric, ceux qu’Audon avait opprimés se soulevèrent contre lui, et le dépouillèrent de tous ses biens. Ils mirent le feu à sa maison, et lui auraient ôté la vie, s’il ne se fût réfugié, avec la reine Frédégonde, dans une église où il se trouva à l’abri[1].

Cette même reine, dont les exactions multipliées furent les moindres crimes, voulait du moins persuader aux Francs qu’elle tenait de leur générosité une partie de ses richesses. À l’occasion du départ de Ragonthe, sa fille, qui devait épouser le fils du roi des Goths, Frédégonde avait ajouté aux dons que la princesse tenait de Chilpéric de grandes sommes en or, en argent et en présents magnifiques : cinquante chariots suffisaient à peine à porter ces richesses. Frédégonde, remarquant l’effet que leur vue produisait sur les Francs se tourna vers eux, et leur dit :

« Braves hommes, ne pensez pas que les présents remis par mon ordre à ma fille proviennent des biens que les anciens rois nos prédécesseurs avaient amassés : tout ce que vous voyez sur ces chariots, je le tiens de mes épargnes et des fréquentes largesses du roi, mon très glorieux seigneur. Mes soins ont aussi contribué à l’augmentation de mes propres richesses. Je puis même dire que la bonté de mon administration dans les terres qui m’ont été données a grossi

  1. Grég. de Tours, trad. de Sauviguy, t. 2, p. 315 et 355.