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CHAPITRE XII

LA LEÇON DE LA FRONDE


On a pris l’habitude de regarder la Fronde comme un épisode romanesque et même galant à cause des belles dames qui s’en mêlèrent. Ce fut, en réalité, la poussée révolutionnaire du dix-septième siècle. Ce « grand siècle » n’est devenu celui de l’ordre qu’après avoir passé par le désordre. Il a eu, vers son milieu, une fièvre, une éruption répandue sur plusieurs pays d’Europe. Nous avons déjà vu le roi d’Espagne aux prises avec des mouvements d’indépendance en Catalogne et au Portugal. À Naples, le pêcheur Masaniello prit le pouvoir et son histoire frappa les imaginations. À Paris, dans les rues, au passage d’Anne d’Autriche, on criait : « À Naples ! » Mais rien ne saurait se comparer à l’impression que produisit la révolution d’Angleterre. L’exécution de Charles Ier, beau-frère de Louis XIII, semblait annoncer la fin des monarchies. Le rapport de ces événements avec les troubles qui éclatèrent en France n’est pas douteux.

On retrouve dans la Fronde les éléments ordinaires dont les révolutions se composent. L’effort et la fatigue de la guerre de Trente Ans y entrèrent pour une part. Richelieu avait demandé beaucoup au pays et tout ce qui avait été contenu sous sa main de fer se libéra sous Mazarin. Il se fit une alliance des grands qu’il avait contraints à la discipline nationale, et de la bourgeoisie qui avait souffert dans ses intérêts d’argent. Pour une autre part, et non la moindre, il y eut le jansénisme, cette Réforme sans schisme, qu’on a pu appeler « la Fronde religieuse ». Les pamphlets contre Mazarin et les polémiques avec les jésuites, les « mazarinades » et les Provinciales (bien que légèrement postérieures) partent du même esprit. Un admirateur