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L’IMBROGLIO ADRIATIQUE

Si les hommes d’État italiens, au moment où ils prenaient leurs précautions par écrit avant d’intervenir, n’admettaient pas l’idée d’une dissociation de l’Allemagne, ils ne pensaient pourtant pas davantage au démembrernent de l’Autriche. Peut-être les plus avisés d’entre eux n’y tenaient-ils pas. En tout cas, au mois d’avril 1919, nous nous sommes trouvés devant la situation suivante : la guerre avait été conduite comme si la destruction de l’Empire austro-hongrois eût été le résultat principal que la coalition se fût proposé d’atteindre ; toutes les opérations diplomatiques suggérées par le roi d’Espagne ou par la cour de Vienne elle-même en vue de disloquer la coalition adverse, avaient été repoussées en 1917 sous le prétexte qu’une paix séparée avec l’Autriche­-Hongrie était rendue impossible par les enga­gements du traité de Londres. Or, les Alliés qui avaient laissé tomber la conversation offerte par le prince Sixte, en se retranchant derrière le traité de Londres, les mêmes Alliés refusaient à l’Italie le bénéfice de ce traité à l’heure où ils étaient les maîtres absolus de la situation. C’est pour en arriver là que l’opportune et légitime manœuvre autrichienne, la dislocation des alliances ennemies, pour laquelle Alphonse XIII avait proposé ses bons offices, avait été repoussée ! Prodigieux scandale pour la raison.

Il était dangereux de décevoir un peuple émotif et politique à la fois comme le peuple