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CARACTÈRES DE LA PAIX

celui qui tient le reste en sa dépendance, l’équi­libre des forces, c’est au contraire celui qui n’est même pas considéré.

Cette omission donne à la paix son principal caractère. C’est une paix qui n’a pas voulu chercher à réaliser l’équilibre. Le respect de l’unité allemande conduisait là. Et toutes les autres conséquences en découlent et en décou­leront. La plus grave est, pour la France, le maintien de la paix armée, la possession d’une grande force militaire nous restant indispensable, soit pour notre sécurité, soit pour prendre les gages que l’inexécution du traité rendrait nécessaires. Un an d’expérience a déjà montré que l’occupation de la rive gauche du Rhin n’était pas suffisante. Il a fallu une première fois aller à Francfort. La saisie du bassin de la Ruhr a dû être donnée pour sanction à l’ « ave­nant » de Spa. On peut dire que le traité de Versailles organise la guerre éternelle.

Il ne nous a même pas mis dans de très bonnes conditions pour la soutenir. La frontière qu’il nous rend, c’est celle de 1870. C’est une frontière d’invasion, dessinée en 1815 contre la France. L’avis des chef militaires qui deman­daient une frontière stratégique n’a pas été retenu. Là-dessus, les « techniciens » n’ont pas été écoutés. Deux exemples historiques prouvent cependant qu’il y a profit à écouter les techniciens dans ces sortes de matières. Quand un état­-major dit : « Ici je puis assumer la défense, et là je ne puis l’assurer », il a ses raisons, ses