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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

jeunes hommes, trop de degrés pour que des sauts brusques, des métamorphoses complètes soient possibles. À cela s’ajoute ce qui ne change pas, c’est-à-dire les lois imposées aux peuples par leurs conditions géographiques et politiques, leurs intérêts et leur caractère. Les événements qui se sont accomplis de 1914 à 1918 ont beau, par leurs proportions, avoir l’air d’é­chapper aux règles ordinaires, ils ont beau res­sembler à une de ces catastrophes qui font table rase, ils ont eux-mêmes subi des antécédents historiques. Ils ont obéi à la loi commune. De la guerre à la paix, leur cours a dépendu sans doute pour une large part de la volonté des peuples (liée elle-même à leur hérédité), mais aussi, et pour une autre part, il a été déterminé par des forces étrangères à cette volonté. Pour ne citer qu’un exemple, M. Clemenceau, chef du gou­vernement français pendant la dernière partie de la lutte, chef de la délégation française pen­dant la préparation du traité, n’était-il pas, dans l’Assemblée de 1871, de ces députés républi­cains qui voulaient, avec Gambetta, la guerre à outrance ? N’était-il pas entré dans la vie politique, avant la chute du second Empire, comme républicain, c’est-à-dire avec l’idéalisme roman­tique de son parti, attaché au principe des nationalités, à la fraternité des peuples, au désar­mement, à l’illusion de la fin des guerres ? M. Clemenceau appartient à une génération qu’on pourrait nommer celle de l’Exposition de 1867. En lui se rencontrent la plupart des courants du