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Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/96

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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

sont ceux qui ont voulu trouver un sens à ces fables absurdes et mettre de la raison dans la folie ». Shakespeare et Voltaire se rencontrent dans le dédain et dans la pitié. Rien n’instruit et rien n’améliore. L’expérience des pères est perdue pour les enfants. L’humanité tourne dans un cercle de douleurs. Devant ce vain théâtre, qui recommence sans cesse, les pro­phètes d’Israël s’étaient voilé la face : les peuples travaillent pour le néant, s’exténuent au profit du feu.

Il faut se délecter dans ce pessimisme ou en secouer la lourde chape. On peut conclure à l’indifférence, à l’inutilité de tout. C’est bien si, pour son compte, on est résolu à endurer les suites de la sottise en se consolant de ce qu’on souffre par l’âcre plaisir que procure le spec­tacle de l’universelle insanité. Mais le moins forcené, le plus désabusé des juifs l’avait déjà dit : nous aurons les conséquences. Et nous les aurons tous. Elles viendront chercher l’iro­niste et le philosophe. On ne sépare pas son sort de celui des nations. Ou bien on ne l’en sépare qu’à la condition de renoncer à soi-même pour se moquer du genre humain.

Un jour, chez nous, la guerre a requis l’homme penché sur la glèbe, le bourgeois économe et prudent, le spéculatif désintéressé et la grande masse de ceux qui pensent qu’après tout, en tout temps et sous n’importe quel régime, on fait fortune et on organise librement sa vie. L’existence du plus grand nombre était fondée