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Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/97

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ILS IGNORERONT

sur des calculs qui supposaient une longue stabilité. Ceux qui prédisaient des catastrophes n’avaient pas d’auditoire ou ne rencontraient que des incrédules. Encore personne n’eût osé annoncer la moitié de ce que nous avons vu. L’homme extraordinairement perspicace qui eût seulement approché la réalité eût passé pour un fou. Il était admis que chacun dispose de soi-même et que les peuples sont les maîtres de leurs destinées : cent causes ont disposé d’eux, causes lointaines, obscures, inaccessibles à la foule, si multiples, si mêlées qu’elles ressemblent à ce qu’on appelle, faute de mieux, le hasard. Cent causes, qui échappent de même à la foule, sont toutes prêtes à en disposer encore.

Après cet immense bouleversement, une seule chose reste intacte : le tête-à-tête du peuple français et du peuple allemand. Les rôles sont renversés. Le vainqueur est devenu le vaincu. La revanche n’est plus à prendre du même côté. Mais, cette fois, le vaincu aura des raisons de la prendre que nous n’avions pas. Il aura des occasions que nous n’avons pas eues. Soixante millions d’Allemands sont devenus nos tributaires dans une Europe où, depuis 1914, la guerre n’a pas cessé et ne s’éteint sur un point que pour se rallumer sur un point différent. La paix est montée comme une mécanique homicide. Et la même question obsède l’esprit. Pourquoi ces choses et non d’autres ? Pourquoi cette paix et non une autre paix ?

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