Comment peut-on être professeur ?
Rester toute sa vie dans les bâtiments scolaires doit certainement empêcher l’irrigation d’un cerveau au départ normalement constitué.
Curieusement, les enseignants, dans leur ensemble, souffrent assez fréquemment d’un complexe de supériorité vis-à-vis de leurs collègues, de la bêtise desquels ils se méfient. Il est connu qu’en classe d’examen les profs de français, de philo ou d’histoire recommandent à leurs élèves les plus « doués » de ne pas être trop subtils le jour de l’épreuve (c’est encore plus vrai quant aux thèses, mémoires et concours dans l’enseignement supérieur).
Leur suffisance les rend volontiers pointilleux à l’égard de leur image de marque. L’expression « petit-bourgeois » semble avoir été uniquement inventée pour eux. Récemment, on me rapportait cette anecdote tellement significative. L’administration pénitentiaire et l’Éducation nationale avaient conclu un accord pour tenter une expérience de formation professionnelle de jeunes détenus en semi-liberté dans un établissement scolaire. Des « précautions » ont bien entendu été prises pour éviter que ne se rencontrent les loups et les agneaux-élèves du lycée. Mais, au réfectoire où mangeaient les jeunes détenus stagiaires, les professeurs étaient censés prendre aussi leur repas. D’eux-mêmes, les enseignants ont pris l’aimable initiative de dresser des paravents. Ces parvenus sont consternants de médiocrité.
Ils ont les combats qu’ils méritent. La Fédération de l’Éducation nationale, la très républicaine, est une confrérie corporatiste, profondément bête, qui se flatte d’être ouverte à toutes les tendances de la connerie. Elle apparaît « traversée de courants contradictoires », signe qu’elle reste « fondamentalement attachée aux valeurs démocratiques ». Elle est bien entendu de gauche et ultra-conservatrice, emploie ses millions de syndiqués à défendre leur statut de fonctionnaires et de laïcité. Programme passionnant.
Je ne serais amère que si je t’avais abandonnée entre leurs sales pattes roses. Je parle ici d’eux avec un absolu détachement. Mais j’entends trop souvent dire qu’ils ont des excuses et qu’en « tête à tête » ils ne sont plus aussi idiots. Cette générosité débonnaire qu’on leur témoigne, et que l’on a rarement envers la police par exemple, m’apparaît trop empressée pour être honnête : on a toujours intérêt à se faire bien voir des professeurs. Mais moi, ça va, j’ai déjà donné. Et il y a peu de chances pour qu’ils aient la possibilité de te le faire payer un jour. Sévère, mais juste, je répète que neuf enseignants sur dix sont des minables.