Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/464

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Il y a à peine cinq ans que parmi les cinq grandes puissances de l’Europe, la Prusse était considérée comme la dernière. Aujourd’hui elle veut devenir et, sans doute, elle va devenir la première. Et gare alors à l’indépendance et à la liberté de l’Europe ! gare aux petits États surtout, qui ont le malheur de posséder en leur sein des populations germaniques ou ci-devant germaniques, comme les Flamands par exemple. L’appétit |75 du bourgeois allemand est aussi féroce que sa servilité est énorme, et, s’appuyant sur ce patriotique appétit et sur cette servilité tout allemande, M. le comte de Bismarck, qui n’a point de scrupules et qui est trop homme d’État pour épargner le sang des peuples, et pour respecter leur bourse, leur liberté et leurs droits, serait bien capable d’entreprendre, au profit de son maître, la réalisation des rêves de Charles Quint.

Une partie de la tâche immense qu’il s’est imposée est achevée. Grâce à la connivence de Napoléon III qu’il a dupé, grâce à l’alliance de l’empereur Alexandre II qu’il dupera, il est déjà parvenu à écraser l’Autriche. Aujourd’hui il la maintient dans le respect par l’attitude menaçante de son alliée fidèle, la Russie.

Quant à l’empire du tsar, depuis le partage de la Pologne et précisément par ce partage, il est inféodé au royaume de Prusse comme ce dernier est inféodé à l’empire de toutes les Russies. Ils ne peuvent se faire la guerre, à moins d’émanciper les provinces polonaises qui leur sont échues, ce qui est aussi