Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/153

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audacieux qui aidèrent Napoléon III à violer la République et à tuer définitivement cette liberté à laquelle, comme on sait, le républicanisme bourgeois, ayant à sa tête Messieurs Jules Favre et compagnie, avait porté les premiers coups mortels ; si ces hommes, après |45 avoir ensanglanté Paris et la France pour satisfaire leur cupidité et leur ambition, tout en satisfaisant la première, avaient largement compris la seconde, ayant à leur disposition les immenses ressources de la France, appuyés sur le dévouement de l’armée et sur la lâcheté de cette bourgeoisie que la crainte du spectre rouge avait jetée dans leurs bras, ils auraient pu constituer un empire excessivement puissant. Pas pour longtemps sans doute, car aucune force politique, si matériellement et mécaniquement puissante qu’elle soit, même l’empire d’Allemagne qu’on est en train de créer aujourd’hui sur les ruines de la France, ne saura se maintenir plus de cinquante ans contre les tendances irrésistibles du siècle. Mais enfin ils auraient pu former quelque chose de très imposant, de très grand dans l’acception non moderne, mais antique, de ce mot, dans le sens de l’État.

Pour cela, il eût fallu beaucoup travailler, comme travaillent Bismarck et Moltke ; et il eût fallu être au moins relativement honnête, non vis-à-vis des individus et du peuple, mais vis-à-vis de l’État. Les comparses de Napoléon III n’ont pas même su ou voulu se donner ces deux vertus des hommes politiques : le travail et l’honnêteté dans le service de