Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/512

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l’État, son intégrité, sa grandeur, sa puissance, et par conséquent aussi son extension si possible, sont posés comme le but suprême auquel tout homme né dans son sein, tout sujet, doit sacrifier tout le reste, il est évident que tous les crimes qu’on commet dans l’intérêt de l’État deviennent autant de vertus. Aussi les hommes d’État, les diplomates qui s’en rendent coupables, loin de s’en cacher, s’en font gloire. Combien de crimes flagrants, par exemple, M. de Bismarck ne vient-il pas de commettre directement contre la France et indirectement contre l’Allemagne ! Eh bien, tout le monde le fête aujourd’hui comme le plus grand homme d’État de l’Europe. Et M. Thiers, pourquoi non seulement les monarchistes et les conservateurs de l’Europe et de la France, mais les républicains eux-mêmes, l’extrême gauche, même l’homme de l’avenir, Gambetta, pourquoi le proclament-ils tous l’homme indispensable et le sauveur de la France ? Parce que, pour le salut de l’État, il a fait assassiner quarante mille défenseurs de la Commune de Paris, cette négation désormais historique de l’État, et qu’il continue d’en fusiller encore quelques-uns, comme des victimes réclamées par cette grande idole de l’État.

On voit que sous toutes les formes de gouvernement, dans les monarchies aussi bien que dans les républiques, du moment que le salut de l’État le réclame, tous les hommes d’État sentent, pensent et font la même chose. Sur ce terrain, tous ils se donnent la main. Mouravief et Haynau, Bismarck et